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Saint Louis et la bataille des chiens

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0000000000000.pngDans le dernier épisode de cette série atroce, nous avons laissé le roi saint Louis avec deux de ses compagnons et don Malodorn Solcum, le génie d'or du Paris futur, alors que celui-ci montrait aux autres des chiens infernaux ayant appartenu à la défunte nymphe Silasán, et disait que leur souffle créait des maladies dans la France des hommes mortels.

Voudront-ils venger leur maîtresse? demanda Louis, tandis qu'Imbert et Alphonse s'encourageaient mutuellement contre ces monstres, trop nerveux pour continuer à écouter la conversation de leur maître avec le génie doré. Ils étaient même étonnés qu'on pût garder son calme à l'approche d'une mort si certaine! Ostön répondit:À coup sûr! Mais ils voudront aussi poursuivre sa mission, car elle était devenue l'esclave d'un être bien plus terrible qu'elle, et auquel appartiennent maintenant ses chiens. Il veut votre mort, car il sait que vous le menacez, et de toute façon il a contre les êtres humains, contre les mortels de la Terre périssable, une haine tenace, un souverain mépris, une rancœur insondable. Amis, tenez-vous prêts!

Louis n'eut pas le temps de demander quel était cet être épouvantable, s'il ne s'agissait pas d'Ornicalc: car si cela avait été le cas, Ostön le lui aurait dit, vu qu'il le connaissait. Déjà le premier chien se jetait sur lui et, se protégeant de son 00000000000.jpgbouclier, il lui asséna un coup d'épée au cou au moment même où il portait une griffe longue comme un poignard sur son écu renforcé. Or l'épée entama à peine son cuir, mais le coup suffit à faire tomber le gros chien de côté, et à affaiblir le coup de griffe qu'il voulait donner au roi de France. Le bouclier argenté aux vingt fleurs de lys n'en reçut qu'une éraflure, et Louis put asséner un coup d'estoc au chien qui avait perdu l'équilibre, et l'enfoncer de quelques pouces dans son épaule. Mais aussitôt le monstre se dégagea, et n'en fut guère ralenti dans son élan batailleur. L'épée mortelle de saint Louis, aussi finement aiguisée fût-elle, n'était peut-être pas adaptée.

Celle de Solcum paraissait l'être plus. Un autre chien avait bondi sur lui, gueule ouverte et pattes en avant. Don Malodorn (car c'était son surnom) remonta brusquement sa lame de gauche à droite, et la cuisse gauche du monstre fut tranchée net, laissant tomber la patte et un bouillon de sang noir.

Cependant la patte tombée continua à se mouvoir, et le chien même, après avoir roulé, se remit sur ses trois pattes restantes, comme s'il ne sentait pas la douleur. Était-il encore vivant? Ou n'était-il qu'une machine commandé à 000000000000.jpgdistance par un autre être? Le flot de sang noir s'arrêta rapidement, comme si des mécanismes internes avaient pu bloquer le flux sanguin, dans ses veines. Ou comme si le sang même avait une volonté propre, et pouvait se mouvoir indépendamment de toute forme.

Ostön aussi avait une arme flamboyante, même si elle était d'un rang apparemment moins élevé que celle de Solcum: elle brillait moins, et son éclat bleu lançait moins d'étincelles, elle était plus éloignée de la nature de la flamme. Il ne s'agissait toutefois pas d'une épée, mais d'une lance, laquelle il avait emportée avec lui. Or, la tenant droite devant lui, il avait attendu de pied ferme un autre chien noir; et quand l'un d'eux avait effectivement prétendu l'attraper à la jambe et la déchirer sans pitié, Ostön fit sans trembler traverser son corps par sa lance vigoureuse, le clouant au sol meuble. Pourtant le chien se mit à mordre la hampe, et à l'entamer, et Ostön dut sortir, de sa ceinture, son coutelas long de chasse, et à en enfoncer la lame dans sa nuque, à l'arrière de la tête.

Le chien secoua cette tête et s'agita, mais sans mourir. Il rugissait, grondait, aboyait, battait des pattes sur le sol, déchirant le gazon de ses griffes acérées – creusant la terre. Sa vie n'était aucunement affaiblie, Ostön n'aurait pas su comment résoudre ce problème, si Don Maladorn, Solcum, d'un coup brusque n'était venu trancher le crâne de ce 00000000000.jpgmonstre, juste à l'arrière des yeux, laissant apparaître son cerveau rutilant, et faisant à terre tomber son visage hideux. Et cette fois le chien ne bougea plus, car il était effrayé, et sur le sol ses yeux roulaient, et il remuait la gueule, mais aucun son naturellement n'en sortait.

Imbert de Beaujeu, de son côté, avait fort à faire pour échapper aux crocs de son assaillant. Il reculait, et agitait son épée brillante de tout l'art qu'il avait appris depuis l'enfance, et l'on entendait résonner le choc des crocs longs du monstre contre l'épée qui parait, et le bouclier protecteur. Ils étaient vifs et rapides, tous les deux, et les deux se neutralisaient mutuellement, mais, alors qu'un autre chien encore était occupé avec Alphonse de Poitiers, le sixième rôdait et pensait à attaquer celui qui serait le plus facile à détruire – et son regard se porta sur Imbert, dont la jeunesse laissait fuir, de son heaume brillant, une chevelure blonde et abondante qui avait attiré son attention, et suscité son désir, ou bien son envie. Et Imbert eût été tué sans attendre si Ostön, qui l'avait vu, n'avait instantanément dégagé sa lance et n'eût bondi, à son tour, sur le chien qui attaquait Imbert dans le dos. Et il enfonça sa lance dans son corps, juste sous les poumons, et la pointe ressortit de l'autre côté. Et comme pour l'autre qu'avait traité ainsi Ostön, il y eut des griffures, des coups de dents sur la hampe de la lance, le monstre ardemment se débattant. Et Solcum bondit aussi, et de nouveau acheva le monstre.

Alphonse de Poitiers reculait, face à son assaillant. Le chien l'avait blessé au flanc, dont le sang coulait sur sa belle armure brillante, sur ses belles mailles. Et le frère du roi saint Louis eût été tué si Imbert de Beaujeu, bondissant par-dessus le chien qu'il affrontait – après lui avoir donné un coup d'épée qui l'avait sonné sans le blesser, si dur était son cuir –, si Imbert de Beaujeu, dis-je, n'était accouru au secours de son cousin, et sautant sur le chien, ne l'avait dévié d'un élan qu'il s'apprêtait à prendre.

Mais il est temps, lecteurs, de laisser là cet épisode, pour renvoyer au prochain, quant à cette étrange histoire.


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